Ces tyrans mégalos poussent à la dépression et au burn out les collaborateurs qu’ils ont choisis comme proie. Quelques indices pour les repérer.
Le terme de « pervers narcissique » s’est échappé des divans et des magazines pour franchir les portes de l’entreprise. Ce comportement déviant, favorisé par le micro management sévit de plus en plus.
Comparé au harceleur moral, dont il est un cousin, le pervers narcissique a ceci de redoutable qu’il avance masqué. A première vue, «c’est un collaborateur parfait, voire un gendre idéal, qui présente toujours bien», décrit Laurent Tylski, directeur général d’Acteo Consulting et Coach de dirigeants. Il est en réalité imprévisible : adorable un jour, envahissant, exécrable le lendemain. Car ce qui l’intéresse, c’est de briller, à vos dépens si nécessaire. Quand Marianne est arrivée dans cette association d’économie sociale et solidaire à Paris, son supérieur lui envoyait sans cesse des mails pour la féliciter de son travail, lui dire qu’elle était devenue un pilier de l’entreprise. Puis il a commencé à l’exclure des réunions : «Marianne est déjà suffisamment absente, qu’elle se concentre sur ses priorités», disait-il.
Mégalos sans scrupule
Ils sont totalement mégalos, estiment qu’ils sont les meilleurs et sont prêts à écraser plus bas que terre les autres pour se mettre sur un piédestal. Car les pervers narcissiques sont dépourvus d’affect. Ils n’ont aucun scrupule à se servir des faiblesses ou points sensibles de leurs victimes pour les anéantir.
Ces odieux personnages baratinent à la perfection, déforment la réalité à leur avantage et n’hésitent pas à mentir sur les propos des collègues ou des clients pour appuyer leur position et déstabiliser leur victime.
Ordres flous
Les pervers narcissiques sont les maîtres des ordres flous, des reproches pas clairs. « Ainsi, quoi que leurs collaborateurs fassent, ce n’est jamais bon, ils peuvent toujours leur dire que ce n’est pas ce qu’ils avaient demandé », commente-t-il.
Comment se protéger ?
La première chose à faire est de ne plus montrer ses émotions, dont se nourrit le pervers. Les psys préconisent aussi de répondre par des phrases courtes du type «c’est vous qui le dites» et de faire remarquer calmement en réunion les attitudes déviantes pour empêcher que s’instaure la loi du silence.
Mais attention, l’entreprise sera encline à traîner les pieds pour ce type de dossier. «Le pervers narcissique est une plaie pour les RH», note Laurent Tylski, d’Acteo Consulting. Car, on l’a vu, son comportement diffère en public et en privé, ce qui complique la tâche pour réunir les preuves. Inutile de claquer la porte d’une réunion à la énième pique à votre encontre, au risque de passer pour un parano hystérique. Pas facile non plus de trouver des témoins quand on a été mis à l’isolement.
Il est alors temps d’alerter la haute hiérarchie ou le DRH. Construisez un dossier béton, car il faut développer une argumentation solide pour justifier un renvoi pour harcèlement moral. Ainsi ce directeur du personnel fraîchement arrivé dans une grande entreprise de transports, qui a dû mener son enquête quand deux salariés se sont plaints du harcèlement moral de leur boss. Il leur a fait produire des témoignages écrits, ainsi qu’à leurs collègues, pour licencier en bonne et due forme la chef de service perverse narcissique pour faute grave. Celle-ci a attaqué l’entreprise aux prud’hommes, puis en appel, sans obtenir gain de cause devant les tribunaux.
Le dossier doit être d’autant plus solide que les pervers narcissiques savent aussi instrumentaliser la justice.
Autre lueur d’espoir, soulignée par Laurent Tylski, coach de dirigeants, qui a lui-même subi ces comportements par le passé : «Quand on a été victime, un processus psychologique de défense se met en place : on ne retombe plus jamais dans l’escarcelle d’un pervers narcissique.» C’est déjà ça.
Savoir reconnaître et contrer un pervers narcissique au travail
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- Le double visage : Il dit une chose et l’inverse
- L’utilisation du « corner » : Le langage à double contrainte
- Isoler et diviser pour mieux régner
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- Le mensonge au quotidien
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